Hommage à Me Gérard Gourgues

 

Hommage à Me Gérard Gourgues
Organisé à l’Université Quisqueya le 16 décembre 2020

Discours de Me Jacques LETANG,
Président de la Fédération des Barreaux d’Haïti

Avec le décès de notre éminent confrère, c’est une époque qu’on enterre ;
Celle d’un combat pour les droits humains qui s’est nourrit du rejet de la dictature ;
Celle de la chute d’un système et de l’avènement de la transition vers un monde meilleur.

Hélas, cette transition est sur le point d’accoucher d’un monstre.
Il ne s’agit pas, évidemment, de se laisser dire comme certains que « c’était mieux avant » ;
Au contraire, il nous faudra un jour tenir ce procès du passé qui, faute d’avoir été condamné, cherche sans cesse à se réinventer.

Il s’agit cependant de dresser un constat froid, amer, douloureux, sur cette incapacité à sortir du provisoire pour construire du solide.

Depuis 10 ans, depuis 20 ans, depuis 30 ans, nous vivons sous des tentes.

Notre démocratie s’est forgée sous des abris précaires, secouée par les ouragans, les incendies, les tremblements de terre.
Son bâtiment principal, le Palais National, n’est jamais ressorti des décombres ;
Son Palais de Justice s’est figé dans un provisoire qui expose chaque jour la vie des acteurs de la justice et des citoyens qui osent encore espérer qu’elle existe.

Notre Etat de droit est aujourd’hui en ruine.

Mais, au-delà des aléas naturels, il nous faut mesurer la catastrophe humaine.
Celle du piétinement des droits humains et de la violation des libertés fondamentales.
Celle du détournement des idéaux au service d’intérêts personnels et stratégiques.
Le peuple est aujourd’hui épuisé, à court d’idées, en manque de changement.
Perdus sur ces chemins de traverse, nous ne parvenons plus à distinguer l’après.

Dans cette noirceur qui fait perdre le sens des choses, il nous faut à tout prix nous accrocher à des symboles.
Me Gérard Gourgues est de ces lueurs qui doivent éclairer notre volonté de vivre et de construire un avenir meilleur.

C’est notre rôle, à nous tous, toutes, avocats, avocates, et militants de droits humains, de remettre au cœur de la lutte la défense des principes ;
La défense des règles intangibles qui doivent nous guider, et contraindre ceux qui voudraient s’en affranchir.

Me Gérard Gourgues a consacré sa vie à cette quête.

Il n’a pas eu la chance au soir de ses jours de récolter les fruits des graines qu’il a si longtemps semé ;
Mais il nous a transmis en héritage cet amour pour le droit et le juste.

Le plus beau cadeau que nous puissions lui offrir en hommage est de poursuivre son œuvre pour le renforcement de l’Etat de droit.

Me Gourgues, ale an pè, rasinn ou ap kontinye travay la !